Initiative radicale à San Antonio au Texas : Un investissement de taille dans l’éducation

Cet été fut divertissant pour ceux qui ont suivi le sort de la politique aux États-Unis. On a eu le plaisir de découvrir ces dernières semaines la vie et la carrière de Julian Castro, maire en second mandat de la ville de San Antonio au Texas, qui a été choisi pour prononcer le discours d’inauguration à la convention nationale des démocrates à Charlotte, en Caroline du Nord. Le maire Castro a récemment proposé de financer l’éducation dans les garderies (pre-kindergarden) à travers une augmentation de la taxe de vente. Pourquoi vous demandez-vous ? C’est assez direct. Le maire Castro ne permettra pas que l’avenir de San Antonio soit dépendant des hauts et des bas de la politique américaine.

En mai 2011, le maire a convoqué le Brainpower Initiative Task Force, un groupe représentant la communauté d’affaires de San Antonio, et ses institutions d’enseignement primaires et secondaires. Il lui a demandé de déterminer quel niveau significatif d’investissement devrait améliorer l’avenir de l’éducation dans la ville. Pendant un an, le groupe a étudié trois domaines de haute priorité: l’éducation en bas âge, la prévention de l’abandon scolaire et l’accessibilité aux collèges. Après avoir évalué les meilleures pratiques et les données comparables des autres villes à l’échelle du pays, le groupe a déterminé qu’un investissement massif dans l’éducation à temps plein en garderie devrait contrer l’écart à long terme dans l’éducation et la performance économique urbaine souhaitée.

Le plan Pre-K 4 SA, mis de l’avant par le Task Force offrira des services de garderie de bonne qualité à 22 400 enfants de 4 ans sur une période de huit ans. Pre-K 4 SA requiert l’instauration de quatre Centres éducationnels d’excellence, chacun couvrant une partie de la ville, et un programme professionnel de développement ciblant spécifiquement les enseignants de la garderie jusqu’à la 3e année. Le point central du développement en capital humain et en infrastructure est reconnu par le Task Force comme une opportunité de construire à long terme, la capacité urbaine de supporter une bonne éducation en bas âge.

Une étude après l’autre démontre qu’une bonne qualité de services de garderie peut avoir des impacts importants et positifs sur l’éducation en général, sur la vie et sur le développement social. Dans son rapport au maire Castro, le Task Force fait référence à une étude de l’Université du Wisconsin, qui mentionne qu’une moyenne de 6 730$ investie dans l’éducation en bas âge d’un enfant permet de sauver 47 759$ à long terme en éliminant ou réduisant les dépenses associées à la remédiation, au chômage ou à l’incarcération. Les résultats les plus troublants sur les garderies ont été publiés l’été dernier dans le magazine Science. Dans une étude appelée « School-Based Early Childhood Education and Age-28 Well-Being: Effects by Timing, Dosage, and Subgroups », les chercheurs ont voulu savoir quel pourrait être l’impact des âges 3 et 4 ans sur la réussite économique, la santé et les familles de ces enfants rendus à l’âge adulte. À 28 ans, les participants qui ont été en garderie, avaient en moyenne, des niveaux d’éducation, des revenus et un statut socioéconomique supérieurs, des meilleures couvertures de santé et un niveau inférieur d’abus de substances ou d’implication avec le système de justice criminelle, que les étudiants qui avaient commencé leur éducation après la garderie.

L’éducation en bas âge a même fait son chemin jusqu’à l’agenda politique de l’administration Obama. En plus de sa présence dans le programme du département d’éducation Promise Neighborhoods et son approche-carrière, les ressources d’apprentissage en bas âge sont identifiées comme une important atout dans le quartier, et dans le programme du département de l’habitation et du développement urbain Choice Neighborhoods ainsi que dans celui du Bryne Criminal Justice Innovation Program sous le département de Justice.

Alors qu’il y a un consensus assez solide sur les bienfaits de l’éducation qui commence tôt dans la vie, nous sommes loin d’une entente sur qui devrait payer la facture pour les enfants de quatre ans. Heureusement, l’État du Texas a offert depuis 1984, une demie journée de garderie aux enfants de familles à faibles revenus, en apprentissage de l’anglais, aux militaires et aux familles d’accueil. Jusqu’en 2011, l’État à également offert 200 millions de dollars en subventions, qui ont permis aux quartiers d’offrir des services à temps plein. Partant de la prémisse qu’une demie journée est bonne mais pas suffisante, les villes à travers l’État ont cherché à combler cette différence. Plusieurs ont convenu de charger des frais. Le maire Castro et son Task Force ont identifié quant-à-eux une solution qui a rendu possible le Pre-K 4 SA, soit une taxe de vente de 1/8 de cent pas encore collectée par la ville.

Qu’est-ce qu’un huitième de cent vous permettra d’acheter ? Apparemment beaucoup. Le Brainpower Task Force a calculé qu’augmenter la taxe de vente de 8.125% au maximum de 8.25% permis par l’État  (et que toutes les villes texanes ont atteint entre 1978 et 2003) permettra d’amasser annuellement un revenu supplémentaire de 31 millions de dollars pour supporter le Pre-K 4 SA. La ville pourra utiliser ce revenu, combiné à des fonds de 11 millions de dollars de l’État pour les étudiants à risques, pour le déroulement du Pre-K 4 SA au cours de huit ans. La contribution annuelle projetée revient donc à 7,81$ par ménage.

En plus de supporter les communautés d’affaires et d’éducation de San Antonio, cette initiative a reçu l’appui des sept maires précédents, couvrant 30 ans de leadership dans la ville, soit Henry Cisneros, Lila Cockrell, Ed Garza, Phil Hardberger, Howard Peak, Bill Thornton et Nelson Wolff. Les anciens maires ont écrit une lettre d’appui au conseil de ville en soulevant l’impact significatif du plan de garderie sur le futur économique et la prospérité de la ville.

Le momentum ne s’arrête pas là. Le 9 août dernier, le conseil de ville de San Antonio est arrivé à la décision unanime de mettre le plan pre-k dans le vote au ballot du 6 novembre.  Maintenant, c’est aux électeurs de la ville à décider. Pas mal du tout pour une taxe de vente en période économique incertaine. Pollster David Metz nous avertit que le support à cette mesure se concentre parmi les démocrates, les jeunes électeurs, les latinos et les faibles revenus, les mêmes segments de l’électorat dont le sort sera incertain au mois de novembre. L’incertitude mise de côté, espérons que ceux qui auront la chance de se rendre aux bureaux de vote vont évaluer cette initiative comme une opportunité. Pour être précis, une opportunité de faire un grand investissement collectif dans le futur de la ville en équipant les enfants des outils nécessaires à la création de leur avenir.


Traduit de l’anglais par Felicia Todor. Image via SFA Union City